En 2025, plus d’un milliard de dollars en crypto-monnaies sont encore liés à des activités criminelles chaque année. Les escroqueries, les rançongiciels, les marchés noirs et les blanchiments d’argent ne disparaissent pas - ils évoluent. Et pour les traquer, les forces de l’ordre et les banques n’ont plus recours à des méthodes traditionnelles. Elles utilisent des outils de forensic blockchain : des logiciels capables de suivre chaque transaction, même sur les réseaux les plus anonymes. Parmi eux, deux noms dominent : Chainalysis et Elliptic.
Vous ne les connaissez peut-être pas, mais ils sont partout. Ils aident la police à saisir des bitcoins volés. Ils permettent aux banques de bloquer des transferts suspects avant qu’ils ne soient confirmés. Ils rendent possible la conformité avec les lois anti-blanchiment dans un monde où les transactions sont censées être invisibles. Mais comment fonctionnent-ils vraiment ? Et quelles sont les différences entre ces deux géants ?
Chainalysis a été fondé en 2013, juste après la chute de Silk Road, le premier grand marché noir sur le Dark Web. À l’époque, personne ne savait comment retrouver des bitcoins volés. Chainalysis a créé la première solution capable de cartographier les flux de crypto-monnaies. Aujourd’hui, elle analyse 85 % de la valeur totale du marché crypto, soit des milliards de transactions par jour.
Le cœur de son offre est Chainalysis Reactor. C’est un outil visuel qui montre, sous forme de réseau, comment les fonds circulent d’un portefeuille à un autre. Un analyste peut cliquer sur une adresse suspecte et voir, en quelques secondes, tous les portefeuilles avec lesquels elle a échangé. L’outil regroupe automatiquement les adresses qui appartiennent à la même entité - par exemple, un échange ou un service de mixage. Il identifie aussi les transactions avec des services illégaux : des plateformes de mixage comme Wasabi Wallet, des darknets comme Hydra, ou des services de staking sur des protocoles non régulés.
Chainalysis ne se contente pas de regarder le passé. Son module KYT (Know Your Transaction) surveille les transactions en temps réel. Si un client d’une banque envoie des fonds vers un portefeuille associé à un piratage connu, KYT alerte immédiatement et attribue un score de risque. C’est ce que les banques comme Barclays ou MUFG utilisent pour bloquer les mouvements suspects avant qu’ils ne soient finalisés.
Chainalysis a aidé à saisir plus d’un milliard de dollars en bitcoins volés, notamment ceux du piratage de Bitfinex en 2016 et des fonds du Darknet Silk Road. Ses analyses ont été admises en tant que preuves dans des tribunaux américains, européens et asiatiques. Pour les forces de l’ordre, c’est l’outil de référence. Pour les institutions financières, c’est un must-have pour rester conforme à l’AML.
Elliptic, basée à Londres, ne cherche pas seulement à analyser ce qui s’est passé. Elle essaie de prédire ce qui va arriver.
Alors que Chainalysis se concentre sur les grandes crypto-monnaies (BTC, ETH, USDT…), Elliptic couvre plus de 100 actifs numériques - y compris les monnaies de confidentialité comme Zcash (ZEC), Horizen (ZEN) et Monero (XMR). Ces monnaies sont conçues pour cacher l’origine et la destination des fonds. La plupart des outils les ignorent. Elliptic, elle, les déchiffre. Elle a développé des algorithmes capables de détecter les transactions masquées dans les protocoles de mixage, même quand les données sont cryptées.
Elliptic analyse plus de 10 milliards de points de données. Elle ne se contente pas de dire : « Cette adresse est liée à un hack ». Elle dit : « Cette adresse a un risque de 87 % d’être associée à un service de mixage dans les 48 prochaines heures ». C’est ce qu’on appelle la prévision de risque. C’est une avancée majeure. Elle permet aux entreprises de bloquer les transactions avant même qu’elles ne soient confirmées sur la blockchain.
Elliptic a aussi créé un API qui s’intègre directement aux systèmes de conformité des banques. Si un client veut envoyer 5 000 euros en DAI vers un wallet inconnu, l’API vérifie automatiquement : est-ce un échange régulé ? Est-ce un portefeuille lié à un piratage ? Est-ce un contrat intelligent sur une DeFi risquée ? Et ça, en moins de 200 millisecondes.
Les entreprises qui gèrent des portefeuilles diversifiés - des fonds de crypto-investissement, des plateformes de trading, des fournisseurs de services crypto - préfèrent Elliptic. Pourquoi ? Parce qu’elle comprend mieux les risques liés aux nouvelles technologies : les bridges cross-chain, les DEX non régulés, les protocoles de staking sur des réseaux peu connus. Elle a aussi des programmes de formation plus complets. Ses certificats sont reconnus dans l’industrie comme la référence pour les équipes de conformité.
| Caractéristique | Chainalysis | Elliptic |
|---|---|---|
| Nombre de crypto-monnaies couvertes | 85 % de la capitalisation totale (environ 30-40 principales) | Plus de 100 actifs, y compris les monnaies de confidentialité |
| Capacité de traçage des monnaies privées (ZEC, XMR) | Limitée | Leader du marché |
| Surveillance en temps réel | Oui (KYT) | Oui, avec analyse prédictive |
| Prévision de risque | Base | Avancée - analyse comportementale et tendances |
| Interface d’enquête | Très intuitive, visuelle, optimisée pour les enquêtes criminelles | Technique, plus adaptée aux analystes de conformité |
| Adoption par les forces de l’ordre | Prédominante - Europol, FBI, DEA | Moins courante, mais croissante |
| Formation et certification | Disponible, mais moins approfondie | Programmes certifiés, reconnus par l’industrie |
| Intégration API | Robuste, mais axée sur les échanges | Plus flexible, adaptée aux banques et aux fonds |
Si vous êtes un agent de police qui doit retrouver des fonds volés, Chainalysis est votre meilleur allié. Son interface est faite pour les enquêtes complexes. Si vous êtes une banque qui doit surveiller des milliers de transactions par jour avec des crypto-monnaies variées, Elliptic vous protège mieux. Il ne s’agit pas de choisir le « meilleur » outil. Il s’agit de choisir le bon outil pour votre problème.
Avant les outils de forensic blockchain, les banques ne pouvaient pas vérifier l’origine des fonds en crypto. Elles devaient simplement accepter les dépôts. Maintenant, elles peuvent dire : « Non, ce portefeuille est lié à un piratage de 2023. Nous bloquons ce transfert. »
Les régulateurs ont pris note. L’Union européenne, avec la loi MiCA, oblige désormais tous les fournisseurs de services crypto à utiliser des outils de traçage. Aux États-Unis, la FinCEN exige que les échanges vérifient l’historique des portefeuilles. Sans Chainalysis ou Elliptic, une entreprise ne peut pas se conformer à la loi.
Ces outils ont aussi changé la nature des crimes. Les trafiquants ne peuvent plus simplement envoyer des bitcoins à un portefeuille inconnu. Ils doivent passer par des mixeurs, des bridges entre réseaux, des DeFi complexes. Et chaque étape laisse une trace. Chainalysis et Elliptic les trouvent. Ils ne rendent pas la blockchain transparente. Ils la rendent traçable.
Ces outils ne sont pas parfaits. Ils ne peuvent pas déchiffrer les transactions sur les réseaux entièrement anonymes comme TurtleCoin ou certains protocoles de layer-2. Ils dépendent de bases de données qui doivent être mises à jour en continu. Si une nouvelle crypto-monnaie apparaît et qu’elle n’est pas encore analysée, elle échappe à la détection.
La formation est un autre défi. Un analyste de Chainalysis doit passer plusieurs semaines à apprendre à utiliser Reactor. Elliptic demande une compréhension approfondie des protocoles DeFi et des mécanismes de mixage. Les petites entreprises n’ont pas les ressources pour former leurs équipes. Elles doivent souvent sous-traiter l’analyse à des fournisseurs tiers.
Et puis, il y a la question de la vie privée. Certains critiques disent que ces outils brisent l’idée même de la crypto : une monnaie anonyme. Mais les utilisateurs légitimes ne sont pas ciblés. Ces outils ne regardent pas les transactions individuelles. Ils cherchent des motifs : des transferts vers des services illégaux, des mouvements rapides entre portefeuilles, des volumes anormaux. Ce n’est pas de la surveillance de masse. C’est de la détection de risques.
Si vous êtes une entreprise crypto, un échange ou un fonds d’investissement : choisissez Elliptic. Son large couvert, ses prédictions et sa flexibilité sont indispensables dans un écosystème en constante évolution.
Si vous êtes une agence gouvernementale, un bureau de police ou un tribunal : Chainalysis est votre outil de référence. Ses preuves sont acceptées en cour, ses analyses sont les plus détaillées, et son réseau d’experts est le plus vaste.
Les deux outils sont coûteux. Les abonnements annuels commencent à 50 000 dollars pour les petites entreprises, et peuvent dépasser 500 000 dollars pour les grandes banques. Mais le coût de ne pas les utiliser est bien plus élevé : amendes, saisies, perte de confiance, fermeture de licence.
En 2025, il n’y a plus d’option. Les crypto-monnaies ne sont plus un monde parallèle. Elles sont intégrées au système financier. Et pour que ce système fonctionne, il faut des outils pour le protéger. Chainalysis et Elliptic ne sont pas des ennemis de la crypto. Ils en sont les gardiens.
Non. Chainalysis couvre environ 85 % de la capitalisation totale, principalement les grandes crypto-monnaies comme Bitcoin, Ethereum et les stablecoins. Elliptic va plus loin, en couvrant plus de 100 actifs, y compris les monnaies de confidentialité comme Monero et Zcash. Mais aucune des deux ne peut suivre les réseaux entièrement anonymes ou les projets très récents qui n’ont pas encore été analysés.
Non. Ces outils ne surveillent pas les transactions individuelles. Ils analysent les motifs : des transferts vers des portefeuilles liés à des crimes, des mouvements rapides entre plusieurs adresses, des volumes inhabituels. Les utilisateurs ordinaires qui font des achats ou des transferts personnels ne sont jamais ciblés. Ce sont les activités suspectes qui sont détectées, pas les personnes.
Il est possible de rendre les transactions plus difficiles à suivre en utilisant des mixeurs, des bridges entre réseaux ou des protocoles DeFi complexes. Mais chaque étape laisse des traces. Les deux outils ont des algorithmes pour détecter ces schémas. Ce n’est pas une course à la fuite - c’est une course à la détection. Et pour l’instant, les outils de forensic sont toujours en avance.
Chainalysis KYT est un système de surveillance en temps réel qui attribue des scores de risque aux transactions. Elliptic API va plus loin : elle analyse les transactions avant même qu’elles ne soient confirmées sur la blockchain, et elle utilise des modèles prédictifs pour anticiper les risques. Elliptic est plus proactif, Chainalysis est plus réactif - mais les deux bloquent les transferts suspects.
Oui, mais pas directement. Les abonnements commencent à 50 000 $ par an. Les petites entreprises utilisent souvent des fournisseurs tiers qui ont déjà souscrit à ces outils - comme des plateformes de trading ou des fournisseurs de portefeuilles. Elles bénéficient de la conformité sans avoir à payer directement.
La prochaine étape, c’est l’intégration avec les systèmes de détection de fraude traditionnels. Les banques vont bientôt utiliser les mêmes outils pour détecter les escroqueries en crypto et en monnaie fiduciaire. Les IA vont analyser les comportements des utilisateurs sur plusieurs canaux : carte bancaire, virement, crypto. La frontière entre le monde financier classique et la crypto va disparaître.
Chainalysis et Elliptic ne sont pas des outils de surveillance. Ce sont des outils de sécurité. Sans eux, la crypto serait encore un terrain de jeu pour les criminels. Avec eux, elle peut devenir une partie légitime du système financier mondial. Le choix n’est pas entre anonymat et transparence. C’est entre chaos et ordre. Et pour l’instant, l’ordre a gagné.
Frederic von
décembre 5, 2025 AT 21:40Et puis, ça fait bizarre de penser que nos transactions sont maintenant comme des empreintes digitales sur la blockchain.
Collin T.
décembre 7, 2025 AT 04:24Thierry Mangin
décembre 8, 2025 AT 03:22maxime plomion
décembre 9, 2025 AT 13:42Rene Gomez
décembre 10, 2025 AT 15:21