Marché cryptographique souterrain en Myanmar : survie et résistance sous répression
sept., 2 2025
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Dans le Myanmar souterrain, l'USDT est utilisé pour les paiements essentiels. Le taux de change varie fortement en raison de la volatilité du marché illégal.
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En 2025, le Myanmar reste l’un des rares pays au monde où posséder ou échanger des cryptomonnaies est officiellement un crime. Pourtant, des milliers de personnes continuent à utiliser Bitcoin, Ethereum et d’autres actifs numériques - pas pour spéculer, mais pour survivre. Dans un pays où les banques sont contrôlées par un régime militaire, où les transferts d’argent sont surveillés, et où les salaires sont versés en espèces après des mois de retard, la crypto n’est pas une mode. C’est une lifeline.
Une interdiction totale, mais une pratique massive
En 2020, la Banque centrale du Myanmar (CBM) a déclaré les cryptomonnaies illégales. Toute transaction, même entre amis, est considérée comme une violation des lois sur les changes étrangers. Les autorités peuvent saisir vos biens, bloquer vos comptes bancaires, et même vous emprisonner. Pourtant, cette interdiction n’a pas arrêté le marché. Elle l’a poussé sous terre.
Les échanges officiels comme Binance sont bloqués par le gouvernement. Alors, les utilisateurs se connectent via des VPN, souvent en cachette, pendant la nuit. Les transactions se font sur Telegram, Facebook, et même TikTok - des groupes privés où des vendeurs en espèces, appelés « cash dealers », agissent comme intermédiaires. Vous envoyez de l’argent en kyat à quelqu’un dans un quartier voisin, et quelques minutes plus tard, vous recevez 0,002 Bitcoin sur votre portefeuille. Pas de contrat. Pas de garantie. Juste de la confiance - ou de la chance.
Qui utilise la crypto, et pourquoi ?
Ce n’est pas seulement des jeunes technophiles. C’est des mères qui reçoivent de l’argent de leurs enfants à l’étranger. C’est des médecins qui veulent payer des médicaments importés. C’est des agriculteurs qui ne peuvent pas ouvrir un compte bancaire. Et c’est des membres de la résistance politique qui financent des opérations clandestines.
Le Spring Development Bank, lancé par le Gouvernement d’unité nationale (NUG) sur la blockchain Polygon, est un exemple frappant. Ce n’est pas un échange. C’est un système de sauvegarde : des économies en or numérique, des transferts en USDT (Tether), des paiements sécurisés pour les communautés réprimées. Il n’existe pas légalement. Mais il fonctionne. Et il sauve des vies.
Le réseau qui tient le marché ensemble : Myan Crypto Masters
Sans écoles, sans cours officiels, sans accès à Internet libre, comment apprendre à utiliser la crypto ? Par les communautés.
Le Myan Crypto Masters Community (MCM), fondé par un homme connu sous le nom de Feliz, compte plus de 23 000 membres. Ils ne vendent pas de crypto. Ils n’organisent pas d’échanges. Ils enseignent. Chaque semaine, ils tiennent des ateliers en ligne en langue birmane : comment créer un portefeuille, comment éviter les arnaques, comment utiliser un VPN sans se faire repérer. Ils montrent des vidéos de 3 minutes sur TikTok expliquant ce qu’est un « stablecoin ». Ils partagent des fichiers PDF avec des schémas simples.
« Beaucoup de gens veulent comprendre la crypto, mais il n’y a presque rien en birman », dit Feliz. « Nous avons créé ce que nous n’avons pas trouvé. »
Ce réseau d’éducation est la colonne vertébrale du marché souterrain. Sans lui, les arnaques seraient encore plus nombreuses. Sans lui, les nouveaux venus tomberaient dans des pièges qui ont déjà ruiné des milliers de personnes - comme la faillite d’un projet de « crypto-pension » en 2022, où des centaines de familles ont perdu tout leur argent en quelques jours.
Les risques : pas de loi, pas de recours
Il n’y a pas de tribunal pour les victimes de fraude. Pas de banque pour récupérer des fonds volés. Pas de police pour enquêter sur un vol de Bitcoin.
Un homme de Mandalay a transféré 5 millions de kyats (environ 2 500 $) à un « dealer » sur Telegram pour acheter de l’Ethereum. L’homme a disparu. Les messages sont restés non lus. Les appels non répondus. Il n’y a eu aucun recours. Aucun journal n’a couvert l’histoire. Personne n’a été arrêté.
Les traders expérimentés savent : ne jamais envoyer d’argent à quelqu’un que vous ne connaissez pas en personne. Toujours vérifier l’identité via un ami commun. Ne jamais garder plus de 100 $ en crypto sur un portefeuille en ligne. Utiliser des portefeuilles hors ligne (cold wallets) pour les grandes sommes. Et surtout : ne jamais parler de vos transactions à des étrangers.
Le marché dans l’ombre : volatilité, énergie et répression
La liquidité est extrêmement faible. Un petit transfert de 1 000 $ peut faire flamber le prix du Bitcoin de 15 % en une heure - parce qu’il n’y a que trois personnes prêtes à vendre. Les prix varient selon les quartiers. Ce que vous payez à Yangon peut être 20 % plus cher qu’à Mawlamyine.
Le minage est aussi illégal. Mais certains le font quand même. Dans des garages, des chambres à coucher, derrière des murs isolés. Les cartes graphiques sont cachées sous des tapis, alimentées par des générateurs à diesel - parce que l’électricité est coupée 12 heures par jour. Si la police fait une perquisition, les équipements sont confisqués. Les propriétaires risquent des années de prison.
Contrairement à la Chine, où le minage a été éradiqué en 2021, le Myanmar n’a pas réussi à éteindre son marché. Il l’a simplement rendu plus dangereux, plus opaque, plus dépendant de la communauté.
Pourquoi ça ne s’arrête pas ?
Parce que la crypto n’est pas un luxe ici. C’est une nécessité.
Les banques refusent les transferts internationaux pour les réfugiés. Les systèmes de paiement mobile comme Wave Money sont contrôlés par le régime. Les transferts de l’étranger - essentiels pour des millions de familles - sont bloqués, taxés, ou surveillés. La crypto, elle, ne demande pas d’autorisation. Elle ne reconnaît pas les frontières. Elle ne connaît pas les sanctions.
Même les entreprises qui vendent des produits de base - médicaments, carburant, nourriture - commencent à accepter des paiements en USDT. Pourquoi ? Parce que c’est la seule façon de rester en activité sans être puni par le régime.
Que va-t-il se passer ensuite ?
Aucun changement n’est prévu. Le régime ne va pas légaliser la crypto. Il ne peut pas. Il considère toute forme de liberté financière comme une menace à son pouvoir.
Mais la demande ne diminue pas. Elle augmente. Chaque mois, des milliers de nouveaux utilisateurs rejoignent les groupes Telegram. Chaque semaine, MCM organise un nouveau cours. Chaque jour, des gens trouvent un moyen de contourner les blocages.
La seule question qui reste : combien de temps ce système clandestin peut-il tenir ? Et quand il échouera - s’il échoue un jour - combien de gens auront perdu tout ce qu’ils avaient ?
Pour l’instant, la crypto au Myanmar n’est pas un investissement. C’est une forme de résistance. Une manière de dire : « Vous pouvez contrôler nos banques, nos salaires, nos téléphones. Mais vous ne pouvez pas contrôler notre argent. »
La crypto est-elle légale au Myanmar en 2025 ?
Non. Toute transaction de cryptomonnaie est illégale au Myanmar depuis 2020. La Banque centrale du Myanmar (CBM) interdit formellement l’échange, le minage et la détention de toute devise numérique. Les violations peuvent entraîner des amendes, la saisie de biens, et jusqu’à cinq ans de prison selon les lois sur les changes étrangers et la lutte contre le blanchiment d’argent.
Comment les gens achètent-ils de la crypto malgré l’interdiction ?
Ils utilisent des réseaux peer-to-peer via Telegram et Facebook, en se connectant avec des VPN pour accéder à des plateformes internationales comme Binance. Des intermédiaires locaux, appelés « cash dealers », échangent des espèces contre des cryptomonnaies. Les transactions sont effectuées en personne ou via des transferts bancaires cachés. Il n’y a aucune plateforme légale ou régulée.
Qu’est-ce que le Myan Crypto Masters Community (MCM) ?
MCM est une communauté éducative informelle fondée par Feliz, avec plus de 23 000 membres. Elle propose des ateliers hebdomadaires, des cours en ligne et des vidéos en birman pour enseigner les bases de la crypto : comment créer un portefeuille, comment éviter les arnaques, comment utiliser un VPN. Elle ne vend pas de crypto, mais elle réduit les risques en formant les nouveaux utilisateurs.
Les mineurs de crypto sont-ils encore actifs au Myanmar ?
Oui, mais en très petit nombre et de manière clandestine. Le minage est illégal, et les autorités saisissent les équipements. Les mineurs utilisent des générateurs diesel pour alimenter leurs cartes graphiques pendant les coupures d’électricité. La plupart ont fui vers la Thaïlande ou le Laos, où les lois sont plus souples. Ceux qui restent opèrent dans des garages ou des chambres isolées, en cachant leurs équipements.
Pourquoi la crypto est-elle plus importante au Myanmar qu’ailleurs en Asie du Sud-Est ?
Parce qu’elle est la seule alternative aux systèmes bancaires contrôlés par un régime autoritaire. Alors que la Thaïlande ou le Vietnam ont adopté des cadres réglementaires, le Myanmar a choisi l’interdiction totale. Cela a créé un vide financier que la crypto remplit pour les transferts internationaux, l’accès aux services essentiels, et la résistance politique - ce qui n’existe pas dans les pays voisins.
Qu’est-ce que le Spring Development Bank sur Polygon ?
C’est un système financier alternatif créé par le Gouvernement d’unité nationale (NUG) pour soutenir les communautés de résistance. Il permet des transferts en USDT, des économies en or numérique, et des paiements sécurisés pour les projets humanitaires. Il est entièrement basé sur la blockchain et opère en opposition directe au régime militaire. Bien qu’il soit illégal au Myanmar, il est largement utilisé par les exilés et les militants.
Les victimes d’arnaques en crypto peuvent-elles obtenir justice ?
Non. Il n’existe aucune autorité légale pour enquêter sur les fraudes en crypto. Les tribunaux ne reconnaissent pas les transactions illégales. Les victimes n’ont aucun recours. Les arnaques sont fréquentes - surtout pour les nouveaux utilisateurs - et les pertes sont irrécupérables. C’est l’un des risques les plus graves du marché souterrain.
La crypto peut-elle un jour être légalisée au Myanmar ?
Seulement si le régime militaire tombe. Tant que le pouvoir reste entre les mains de la junte, la crypto restera illégale - car elle représente une forme de liberté financière que le régime ne peut pas contrôler. Si un gouvernement civil revient au pouvoir, il devra choisir : réprimer davantage ou réguler. La plupart des experts pensent qu’une régulation encadrée sera inévitable, mais cela prendra des années, voire une décennie.
5 Commentaires
Babette Silber
décembre 5, 2025 AT 15:57
C’est fou ce que les gens font pour survivre… 💔 Je vois des gens sur TikTok qui font des reels sur leur Bitcoin comme s’ils étaient des influenceurs, mais là, c’est de la survie pure. J’ai les larmes aux yeux. 🇲🇲💔
Tainá Viviane
décembre 6, 2025 AT 16:32
Il est regrettable que l’absence de cadre légal ne justifie pas l’ignorance des risques systémiques. La crypto, même dans des contextes de résistance, demeure un outil non régulé, et donc intrinsèquement instable. Une erreur de syntaxe dans un portefeuille peut coûter la vie à une famille. La prudence, ici, n’est pas un luxe.
Frederic von
décembre 7, 2025 AT 13:36
Ce que fait MCM est incroyable. Pas de subventions, pas de ONG, juste des gens qui partagent des PDF et des vidéos de 3 minutes pour éviter que d’autres se fassent arnaquer. J’ai un ami à Lyon qui enseigne le code à des réfugiés - il a dit qu’il avait jamais vu une communauté aussi solidaire. La crypto, là-bas, c’est pas de la finance, c’est de l’humanité. Et c’est ça qui me touche le plus. On parle de blockchain, mais c’est le réseau humain qui tient tout ça debout.
Collin T.
décembre 8, 2025 AT 09:17
Ah oui bien sûr, les gens utilisent la crypto pour sauver des vies… et vous croyez vraiment que ce n’est pas une manipulation du NUG pour légitimer leur gouvernement parallèle ? Toute cette histoire sent le coup médiatique. Qui a financé ces ateliers ? Qui a créé les PDF ? Et pourquoi personne ne parle des milliers de victimes qui ont perdu tout leur argent dans des arnaques en 2022 ? Parce que c’est plus facile de faire un article émouvant que de dire que c’est un désastre organisé. Vous voyez des héros, moi je vois un marché noir qui se fait passer pour une révolution.
Thierry Mangin
décembre 8, 2025 AT 15:29
Je vous le dis : cette crypto au Myanmar c’est une opération de désinformation. Les USA et les oligarques russes financent tout ça pour déstabiliser la Chine. Vous croyez que les gens utilisent Bitcoin pour acheter des médicaments ? Non. Ils reçoivent des ordres via des portefeuilles pour activer des logiciels espions dans les téléphones des soldats. Le VPN ? C’est un canal de communication pour le MI6. Et ce Feliz ? Il travaille pour une ONG liée à la CIA. Vous avez vu comme ils parlent toujours de la junte ? C’est pour faire peur et justifier l’intervention. C’est du PSYOP pur. Et vous, vous mangez ça comme des bonbons.
Babette Silber
décembre 5, 2025 AT 15:57Tainá Viviane
décembre 6, 2025 AT 16:32Frederic von
décembre 7, 2025 AT 13:36Collin T.
décembre 8, 2025 AT 09:17Thierry Mangin
décembre 8, 2025 AT 15:29